Ma réédition du 11 Novembre
Verdun :(ceci est une réédition et tous les commentaires d'origine sont maintenus)
En Octobre 1999, avec un important groupe d'Amis (et sur la suggestion de l'un d'eux) venus de toutes régions,et même au-delà, nous avons voyagé dans la région de Verdun, avant de nous rendre en Alsace au Mont Sainte Odile, non seulement pour une visite, mais encore pour un devoir de Mémoire et de Pardon et de Réconciliation.
Après des lieux tristement célèbres, Douaumont, Fort de Vaux, Fleury, sur lesquels il y aurait tant à dire, mais je ne le ferai pas, réservant mon témoignage à la suite du voyage : nous nous sommes rendus dans deux cimetières militaires, l'un Français, l'autre Allemand. Après notre visite et avoir accompli notre mission de pardon et de réconciliation, j'ai écrit ce texte que je viens de retrouver et qui est en 2018 toujours d'une triste actualité...Ce voyage fut fort émouvant pour tous.
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Bernhard Link, Johann Kaiser, Georg Weiss, Oskan Jackel, Joseph Beer, Georg Amon, Joseph Holzinger
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Tous les 7 reposent en paix dans le cimetière militaire allemand de St. Mihiel, perdu, caché dans les bois et difficile à trouver sous les rafales de vent et la pluie, tout comme reposent les 715 000 victimes de cette boucherie, quel que soit leur camp.Les 4 premiers sont morts au combat le 22 avril 1915, les 3 autres le lendemain 23 avril. Quel hasard a voulu qu'ils soient enterrés dans le même emplacement dans ce cimetière perdu dans les bois, pourquoi cette tombe commune n'est-elle pas surmontée comme les autres d'une croix mais d'une plaque de pierre portant leurs noms ?
Ce sont des noms allemands, peu importe, ils auraient pu être Français, des Hommes comme eux-mêmes. S'ils avaient continué de vivre, ils auraient maintenant une centaine d'années, ils seraient devenus des vieillards, avec des enfants, des petits-enfants et des arrières petits enfants. Mais le destin a voulu qu'ils ne vieillissent pas, ils auront toujours au regard du Monde un âge figé de 20 à 25 ans. L'un d'entre eux Oskan était sous-lieutenant, il représentait par son grade une parcelle de l'autorité et il est mort, comme ses camarades, comme ceux que la différence de Nations avaient rendus ennemis. Représentait-il vraiment cette autorité auprès des simples soldats, ses subordonnés du même âge ? Il est mort, comme eux, et il est avec eux, victimes comme eux des autorités supérieures responsables de cette folie.
Je ne sais pas pourquoi, mais je me suis dirigé sans hésiter vers cette tombe collective, marquée par cette pierre gravée, je leur ai dédié la Prière de François d'Assise que j'avais sur moi
Seigneur, faites de moi un instrument de votre paix. Là où il y a de la haine, que je mette l'amour. Là où il y a l'offense, que je mette le pardon. Là où il y a la discorde, que je mette l'union. Là où il y a l'erreur, que je mette la vérité. Là où il y a le doute, que je mette la foi. Là où il y a le désespoir, que je mette l'espérance. Là où il y a les ténèbres, que je mette votre lumière. Là où il y a la tristesse, que je mette la joie. Ô Maître, que je ne cherche pas tant à être consolé qu'à consoler, à être compris qu'à comprendre, à être aimé qu'à aimer, car c'est en donnant qu'on reçoit, c'est en s'oubliant qu'on trouve, c'est en pardonnant qu'on est pardonné, c'est en mourant qu'on ressuscite à l'éternelle vie.
et que j'ai laissée sur la tombe.Je ne peux pas tenir d'autres propos car peut-on décrire l'indescriptible ? Il n'y a pas de mots assez forts pour imager l'effroyable boucherie des guerres où l'essence même de la Vie, de l'Être humain est totalement bafouée. Il faut cependant témoigner que les lieux visités, à part quelques exceptions terribles (comme la tranchée des baïonnettes ou la nécropole de Douaumont) sont empreints d'une Paix, d'un silence, et attirent le recueillement. La nature, elle aussi mutilée et même transformée par les combats (22 millions d'obus de part et d'autres dont 1/4 non encore explosés) , a repris ses droits, gardant toujours de vastes cicatrices que la végétation ne peut cacher.
Devant de telles choses, on ne comprend pas la folie incommensurable et le pouvoir destructeur des Hommes. Après chaque guerre, après chaque massacre, les dirigeants de tous les Pays proclament "plus jamais ça !"...et recommencent ! On a créé des organismes internationaux, d'abord la Société des Nations puis l'Organisation des Nations dites Unies ; on a signé des traités, la démilitarisation des zones à risques, la création de Casques Bleus qui assistent aux massacres les mains dans les poches, la création de zones-tampons, la menace de sanctions illusoires, mais tout ceci n'a majoritairement servi à rien : à chaque instant dans le monde des conflits, des violences éclatent entre Nations et même à l'intérieur des Peuples.Tout reste-t-il donc à trouver, à inventer ?
Un humoriste a dit que si réellement Dieu a créé l'Homme à son image, le modèle ne doit pas être beau à voir. L'Homme est-il bon et sinon comment le changer ? Ce sont autant de questions auxquelles je n'ai pas la prétention de répondre car cela dépasse complètement le petit homme que je suis, mais je peux cependant y participer, comme le raisin d'une grappe, car tout cela passe forcément par un changement de l'Esprit, un oubli de soi et un Amour et un respect au plus haut degré des autres et de tout ce qui est, tout doit pouvoir être un Temple où l'on célébrerait ce qu'il y a de plus haut et de plus sacré : la Vie.
merci à Marie-Lise Tosi et Yves J.
(pour publier ce billet j'ai ajouté quelques données techniques que j'ai trouvées sur http://fr.wikipedia.org/wiki/Bataille_de_Verdun et que j'espère exactes)
AJOUT
Et je ne savais pas que plus tard, grâce à une relation personnelle, je serais convié à assister à l'immense son et lumière Des flammes à la Lumière sur la tragédie de Verdun, en spectateur privilégié avec auparavant une visite des lieux suivie d'un repas communautaire puis d'un séjour de nuit ! ...(Connaissance de la Meuse, merci à Sylvie N.)